LECTURE DÉTENTE
► Titre : Le secret du sexe déchu
Auteur : Freeric Huginn
Sorti le 5 avril 2019
Lu en mars
Auto-édition
Genre : Dystopie
► 4eme de couverture :
Les misandres ont pris le pouvoir.
C’est tout ce que votre accréditation m’autorise à vous révéler.
Le reste est classé « Top Secret ».
Libre à vous de chercher la Vérité, mais ne comptez pas sur moi.
Vous devrez la trouver seule.
À vos risques et périls...
Je remercie Freeric Huginn de m'avoir offert ce livre au format numérique.
Assise dans le fauteuil en cuir à côté de sa grand-mère, la petite-fille osa enfin poser la question qui lui brûlait les lèvres.
« Mamie, c’était comment avant ?
- Oh ma chérie, j’espère que tu as du temps devant toi…
Mon monde, celui que tu n’as pas connu, ressemblait à s’y méprendre au nôtre. La grande différence résidait dans les mentalités et la façon dont les individus se jugeaient perpétuellement entre eux… Si tu savais comme j’ai souffert, comme j’ai maudit certaines personnes, comme j’en ai haï d’autres. Ma gorge se noue en pensant à toutes les atrocités perpétrées au nom d’une soi-disant justice.
- Dis-m’en plus… Personne n’en parle jamais et les livres d’Histoire balayent le sujet d’un revers de main. J’ai bien essayé d’en apprendre un peu plus par moi-même, notamment en lisant Le secret du sexe déchu de Freeric Huginn mais je peine à croire tout ce qui y est écrit ; la violence et le mépris, le manque de respect et les trahisons.
- Hélas pourtant, tout est vrai. Je comprends que tu sois choquée et j’aurais sans doute eu la même réaction à ta place. Je m’interroge toutefois, comment as-tu eu ce livre entre les mains ? Je pensais que seule une poignée d’initiés en avait connaissance. »
Gênée, l’adolescente rougit jusqu’aux oreilles. Elle mit quelques secondes avant de formuler une réponse à peine audible.
« Je connais des gens…
- Je vois. Je crois que je vais devoir me contenter de cette réponse, aussi évasive soit-elle… Nous aurons l’occasion d’en rediscuter jeune fille, sois-en sûre. L'aïeule avait bien appuyé sur chaque syllabe de manière à être correctement entendue et comprise.
- Le titre et la couverture m’ont interpellé et je n’ai pas su résister à la tentation de le lire.
- Bon, puisqu’il en est ainsi, je vais tâcher de répondre à tes questions et te décrire la vie à mon époque. J’espère que tu es prête, ce que tu vas attendre risque fortement de ne pas te plaire. »
Elle attendit que la jeune femme hoche la tête avant de poursuivre son récit.
« Je vivais dans une société misandre, oui oui, les femmes éprouvaient une aversion manifeste et maladive envers les hommes. Ces derniers n’avaient presque aucun droit si ce n’est celui de se taire et d’exercer des métiers ingrats. Les femmes dominaient et les hommes, ou les mâles - c’est comme tu préfères - s’inclinaient. Derrière ce système matriarcal se cachaient plusieurs rouages que les marâtres se gardaient bien de divulguer. À présent, et étant donné ta récente lecture du livre, de quels points en particulier veux-tu parler ?
- Hmmm, à bien y réfléchir j’aimerais aborder des aspects techniques et propres à la forme du livre avant de me pencher sur le fond et sur le fonctionnement de ta société.
- Je t’écoute.
- J’ai, dans l’ensemble, passé un très bon moment de lecture, prenant beaucoup de plaisir à découvrir cet univers aussi fascinant que terrifiant, effrayant dans sa façon de codifier les rapports humains. Il s’agit d’un livre très sombre et parfois choquant, mais nécessaire je le pense. C’est pourquoi je veux d’abord parler de ce que j’ai le moins aimé, ce qui m’a fait tiquer à plusieurs reprises. »
Un ange passa avant qu’elle ne commence son argumentaire, tentant de mettre le plus d’ordre possible dans ses idées.
« J’ai eu quelques difficultés avec la plume de Freeric Huginn. Je l’ai d’abord trouvé trop simple avant de m’apercevoir qu’elle s’enrichissait au fil des chapitres. Un temps d’adaptation a été nécessaire afin de réussir à dompter ces mots et ces tournures si particulières. Plus je lisais, plus je me rendais compte que l’auteur aimait commencer ces phrases par des termes tels que mais, comme, ou encore car. J'exècre les phrases débutant par “car”, je trouve cela tellement disgracieux que j’en grince des dents. Passe encore de l’utiliser une ou deux fois pour proposer un effet de style, toutefois son emploi plus que récurrent m’a fait lever les yeux au ciel à de nombreuses reprises. M’est avis que cela fait partie intégrante du style de l’auteur et qu’il doit y avoir une justification, sans doute une volonté de rythmer le récit… Si tel est le cas, ces tournures ont eu l’effet inverse sur moi, me faisant immédiatement sortir de la lecture. Lorsqu’un point peut être remplacé par une simple virgule et éviter que la phrase suivante ne commence par “mais” ou “comme”, je trouve qu’il ne sert pas à grand-chose de vouloir à tout prix casser le rythme.
- Ma douce, je pense que c’est une façon d’écrire. Tu l’as dit, c’est le style de l’auteur.
- Je le conçois tout à fait, je précise juste que je n’y suis pas sensible de la meilleure des manières… De même, beaucoup de comparaisons permettent de visualiser les choses mais elles sont en trop grandes nombres à mon goût, un peu comme les sauts de ligne entre presque chaque phrase… J’avoue ne pas avoir compris, peut-être est-ce une erreur de la version dont je dispose. Je terminerai ma critique sur le style en évoquant la construction des phrases ; les verbes se trouvaient régulièrement à la fin quand ils n’étaient pas carrément absents… Une fois de plus, ma lecture s’en est trouvé grandement perturbée, je crois que ce style n’est définitivement pas pour moi.
- En effet, cela arrive. Tous les goûts sont dans la nature et une façon de manier les mots ne fait pas tout.
- Oui c’est sûr ! Avant de passer aux réjouissances, j’aurais encore un petit aspect à développer, il concerne le manque d’approfondissement que j’ai parfois ressenti. Freeric Huginn propose un récit plutôt complexe et bien construit, une histoire dans laquelle les intrigues se mêlent afin de démontrer l’étendue de la toile se refermant sur les personnages. Il plonge le lecteur dans un univers dystopique dans lequel s’imagine facilement, le monde décrit étant proche de celui que l’on connaît. Je déplore toutefois un manque d’informations relatif à l’organisation de cette société, à sa gestion ainsi qu’aux organes qui régissent la vie de tous. À de rares reprises, je pouvais espérer recueillir de minces éléments, trop peu eu égard la richesse de l’histoire. Je ne parvenais pas à me représenter dans l’espace ni à comprendre comme telle ou telle chose fonctionnait vraiment. Il est question de manigance politique, de pouvoir et de volonté d’asseoir une domination, je pense que j’aurais voulu comprendre les mécanismes et le poids des institutions… Je suis sans doute trop curieuse.
- Tu as raison d’aborder ce qui t’a déplu. Tu sais, je crois que personne ne savait vraiment comment tout cela fonctionnait… Moi-même je n’ai que de vagues souvenirs, nul ne m’a appris l’intérêt des organismes régissant notre vie. Nous savions que nous devions écouter et obéir à Mère, qu’elle seule connaissait la vérité.
- Certaines choses étaient et resteront top secrètes alors… tant pis pour moi ! L’alternance des points de vue et des situations m’a permis d’avoir une idée globale de la société.
- Totalement, il est indispensable de croiser les informations et de ne rien prendre pour acquis, plus les sources sont nombreuses, plus tu te rapproches de quelque chose de vrai et de vraisemblable. »
La plus âgée des deux femmes fit un geste en direction de l’autre qui se tut aussitôt. Toutes deux prirent alors le temps de savourer un bon thé fumant, une pause bienvenue afin de mettre en ordre ses pensées.
« Tu sais mamie, ce que j’aime dans les dystopies c’est le regard critique qu’elles ont sur les sociétés, sur leur face cachée, leur côté sombre. Elles permettent de voir le monde d’un autre oeil et c’est ce qui en fait toute la richesse. Je trouve qu’avec Le secret du sexe déchu, l’auteur transpose des situations actuelles ou appartenant à une autre époque, il inverse les rôles entre les hommes et les femmes. La violence, le mépris comme le manque de respect trahissent les sentiments de ces dernières.
- Les femmes ne pensaient pas par elles-mêmes, elles étaient conditionnées, presque formatées… ce qui fut aussi le cas des hommes il y a des siècles…
- J’ai l’impression que les femmes ont voulu prendre leur revanche ! À mes yeux la revanche est une arme de destruction massive là où le pardon et la tolérance sont les piliers du progrès humain. Elles ont agi dans une volonté de détruire et d'asseoir une domination acquise on ne sait comment.
- La soif de pouvoir des uns (ou plutôt des unes), n’a d’égal que leur égo démesuré ma chérie.
- Tu as sans doute raison. J’ai du mal à croire que les personnages du livre puissent avoir été ainsi dans la réalité… et pourtant force est de constater que tout est vrai. Bon, je te l’avoue grand-mère, je ne me suis attachée à personne. J’ai eu le sentiment que tous les personnages étaient des pions sur un gigantesque échiquier, voués à être sacrifiés ou alors à promotion pour les plus chanceux. Chacun exécutait son rôle sans forcément s’apercevoir que tout cela pouvoir s’inscrire dans un mécanisme bien plus grand. Quelques-uns en avaient conscience mais pas tous, c’était amusant d’observer le chemin qu’ils empruntaient et les obstacles qu’ils rencontraient.
- Nous sommes tous des grains de sable dans le désert, certains sont juste plus gros que d’autres, contribuant à faire de plus grandes choses. »
Toutes deux burent une gorgée de leur thé, captivées par la discussion qu’elles menaient. Ce qu’elles aimaient ces instants hors du temps et complices, ces rares moments durant lesquels tout pouvait être dit, sans le moindre jugement.
« Je crois comprendre que dans ce livre, les enjeux sont divers et variés, surtout pour les personnages. Les hommes veulent rétablir un semblant de normalité et ne plus vivre sous le joug des femmes là où celles-ci souhaitent renforcer leur position. Entre les deux, des âmes en peine qui se désolent de ce triste spectacle, un peu à ton image je pense. Comment réagir et que faire quand tout semble perdu ? Doit-on baisser les bras ou se battre pour ce qui nous semble juste ? Lorsque les enjeux sont aussi bien politiques que sociétaux et économiques, la partie se corse. Il faut ajouter à cela une dose très généreuse de trahison, le tout pour un final explosif ! À parcourir les chapitres du livre, j’ai eu l’impression que l’idée de trahison revenait très régulièrement et j’en viens à me demander si le propre de l’humanité est de trahir ses semblables….
- Je constate que ce titre t’a fait réfléchir et je pense que c’est sans doute le but recherché : donner à réfléchir aux lecteurs, enfoncer des portes déjà ouvertes et briser certaines barrières. Peut-être ne le sais-tu pas mais Freeric Huginn se qualifie comme tel “Je suis le caillou dans ta chaussure. Ce petit gravier parmi tant d’autres qui t’obligera à t’arrêter en chemin afin de pouvoir reprendre ta route d’un pied léger.» Je suis donc heureuse de voir que tu as rencontré ce petit caillou et que tu as parcouru un bout de chemin avec lui.
The Syrinx Arthur Hacker |
- Il y aura toujours des partisans de ces deux méthodes. Laquelle est préférable à l’autre ? Nulle ne le sait, si ce n’est le Temps.
- Le Temps… Une bien vaste notion. Le secret du sexe déchu m’a également fait réfléchir quant aux rapports hommes/femmes, quant aux différences codes qui régissent ses relations… Les places respectives de l’amour, de l’amitié mais aussi du respect semblent se disputer le bas du classement, comment en est-on arrivé à de telles extrémités ? Le constat est aussi amer que cinglant. Cette histoire apprend le lecteur, s’il est réceptif, à ouvrir les yeux sur le monde qui l’entoure ; tout n’est pas vrai, et ce peu importe ce que l’on tente de vous faire croire, vérifiez et croisez les sources.
- Je pense que tu as dit l’essentiel. Pour avoir lu ce livre, je peux assurer qu’il donne à considérer les choses sous un autre angle, à s’interroger sur notre vie, sur notre façon de vivre et de nous comporter, sans doute aussi sur notre lâcheté d’une certaine manière. Nous avons la fâcheuse tendance à fermer les yeux sur ce qui ne nous plaît pas, Freeric Huginn nous rappelle à notre condition, à la réalité des choses. Le secret du sexe déchu se lit vite et enfonce des portes sans doute déjà ouvertes, il fait partie de ces livres qui vous marquent.
- Et dire que tu m’as grondé en apprenant que je l’avais lu… voilà maintenant que tu le recommandes ! Sacrée mamie ! Il faut toujours suivre tes conseils.»
C’est ainsi que se termina l’échange entre les deux femmes, les yeux pétillants de malice et un immense sourire complice aux lèvres.
► 3 raisons de lire Le secret du sexe déchu :
- Une histoire complexe et fascinante
- Une inversion des rôles hommes/femmes
- Une réflexion pleine de sarcasmes
Rien que le résumé attire l'attention et intrigue ! J'aime beaucoup les réflexions qu'il semble apporter, l'univers est extrêmement original et ton avis est terriblement tentant ma belle ❤
RépondreSupprimerJe suis d'accord avec toi !
SupprimerLes réflexions sont vraiment intéressantes et nous invite à changer de regard. Je suis contente de te tenter ♥♥
Hyper originale ta chronique, j'aime beaucoup la forme :) Je vais passer mon chemin par contre, je ne pense pas que ce soit pour moi :)
RépondreSupprimerMerci beaucoup ! :)
SupprimerJe comprends tout à fait, ce sera pour une prochaine fois :)
Excellente chronique !
RépondreSupprimerMerci beaucoup !!
SupprimerBon, tu le sais, on en a déjà discuté en privé, je ne pense pas qu'il soit pour moi mais j'apprécie les nuances que tu apportes à ton avis :)
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup tes chroniques, éclairantes et tellement bien travaillées. ♥
En effet, peut-être l'aurais-tu apprécié il y a quelques années, quand les livres de l'Imaginaire t'inspiraient davantage :) Chacun ses périodes, je suis passée par là aussi :D
SupprimerMerci à toi pour tes mots qui me vont droit au coeur ♥
Je ne vais pas m'attarder dessus malheureusement vu la façon dont tu parles du style je risquerais de ne pas le terminer
RépondreSupprimerDisons que je n'ai pas accroché au style mais que ça reste agréable à lire, contrairement à certains livres où là je peinais vraiment à avancer, mais je peux comprendre que ça rebute un peu. Tant pis :)
SupprimerChronique très intéressante mais malheureusement je ne pense pas que ça soit pour moi !
RépondreSupprimerMerci beaucoup ! Je comprends, ce sera pour une prochaine fois :)
SupprimerLe sujet m'interpelle beaucoup même si le style me fait un peu peur.
RépondreSupprimerMerci pour cette belle chronique complète.
Bonne journée
Une fois que l'on s'est habitué au style, je trouve que l'on apprécie beaucoup plus, disons juste que c'est un aspect des livres auquel j'accorde une grande importance alors forcément j'évoque tout ce qui me fait un peu tiquer. Les sujets abordés et la manière dont ils sont traités sont vraiment intéressants :)
SupprimerMerci à toi, belle journée également.
Salut !
RépondreSupprimerJ'adore comment tu as écrit ta chronique sous forme de dialogues entre deux femmes de deux générations différentes.
Mais même si ton avis est très tentant, même si tu nous donne très envie de lire ce roman je pense que je vais passer mon tour.
En tout cas le principal c'est qu'il t'ai plu !
Bisous et bonne journée :)
Coucou !
SupprimerMerci beaucoup, je suis ravie que le format te plaise. J'essaie d'innover et de créer des petites mises en scène pour chaque chronique :)
C'est un livre qui fait réfléchir et qui peut perturber, je peux comprendre qu'il tente mais que l'on ne veuille pas forcément le lire :)
Merci pour ton passage Manue, gros bisous et belle journée.
Je trouve ça génial ! moi je n'y arrive pas donc chapeau ! c'est ce qui fait que ton blog est unique :)
Supprimerbisous et belle journée à toi aussi
J'avoue que ce n'est pas un livre qui me plairait particulièrement mais qui est loin d'être sans intérêt! Par contre je constate que tu t'es renouvelée depuis quelques temps dans ta façon d'écrire les chroniques. Nouveau look, nouvelle chronique? :p
RépondreSupprimerC'est un livre qui se lit rapidement et qui donne à réfléchir, le genre d'histoire que j'aime découvrir :)
SupprimerUn peu oui, j'essaie d'être originale et de tenter une autre approche dans mes chroniques, ce n'est pas toujours évident mais au moins ça me fait réfléchir et ça m'amuse :) Donc oui, nouveau look pour de nouvelles chroniques :p
Je trouve ta chronique très intéressante et ça m'interpelle beaucoup dans la façon dont tu parles de ce livre. En temps normal, je ne me serai même pas arrêtée dessus mais là, j'aurai envie de te dire "pourquoi pas !"
RépondreSupprimerMerci beaucoup ! :)
SupprimerIl est vraiment très sympathique, parfois violent mais les leçons à en tirer sont superbes. Contente de voir qu'il pique un peu ta curiosité.